Numéro 22 (Printemps 2021): Rencontres interculturelles
Sous la direction de Mercédès Baillargeon (University of Maryland) et Karine Bertrand (Queen’s University)
La version anglaise suit
Dans un article de 2008, Denis Bachand déclarait que l’interculturalité était un des deux motifs principaux qui se dégageaient de la production cinématographique québécoise du XXIe siècle, en se présentant comme un vecteur du questionnement identitaire, enjeu si cher au cinéma québécois[1]. En effet, si les deux dernières décennies s’avèrent riches en exemples de productions qui démontrent clairement les enjeux propres au multiculturalisme et à l’identité québécoise (Littoral, Mouawad, 2004 ; Home, Katrapani, 2002), cette problématique est présente sur les écrans québécois depuis plus de soixante ans, avec des films tels que À tout prendre (1963) de Claude Jutra, Mémoire battante (1983) d’Arthur Lamothe et Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer (1989) de Jacques Benoit. Plus récemment, un numéro spécial de Contemporary French Civilization réitérait cette affirmation voulant que le cinéma québécois contemporain se penche désormais sur les questions d’identité, de culture et d’identification en lien avec un transnationalisme de plus en plus prégnant dans le milieu du cinéma[2].
Ce phénomène est par ailleurs rendu possible par l’ouverture physique et symbolique de frontières internes/externes du Québec et de sa production cinématographique. D’une part, les vingt-cinq dernières années connaissent un boom de coproductions (France, Belgique, etc.) tandis que, d’autre part, les cinéastes deviennent de plus en plus mobiles (pensons à Xavier Dolan, en France et aux États-Unis, ainsi qu’à Jean-Marc Vallée, qui a maintenant réalisé plus de trois films et une série HBO aux États-Unis). L’ouverture des frontières et une immigration croissante ont, de plus, changé le visage du cinéma québécois. On remarque aussi une reconnaissance et une intégration de plus en plus grande de la diversité existant déjà sur le territoire québécois, avec l’explosion des cinémas autochtone et anglo-montréalais, par exemple. Ces nouvelles réalités politiques et culturelles poussent ainsi de plus en plus le Québec à envisager le nationalisme selon les modes de l’ouverture et de la déterritorialisation des cultures[3].
Dans ce contexte, l’émergence, au cours des dix dernières années, d’un cinéma autochtone et d’un cinéma migrant reflétant le climat politique et social d’une province qui s’interroge davantage sur sa place en tant que colonisatrice (Commission vérité et réconciliation oblige) et terre d’accueil (Commission Bouchard-Taylor, Loi sur la laïcité de l’État) a grandement contribué à cette reconfiguration du cinéma au Québec, les cinéastes autochtones et migrants se positionnant comme des agents médiateurs qui font le pont entre la culture d’origine et la terre d’accueil, entre le territoire ancestral et ce qui se situe à l’extérieur de ses frontières. Dans de nombreux cas, les œuvres issues de ces créateurs portent les couleurs métissées de cultures qui s’imprègnent de l’ici et de l’ailleurs, et voient le jour grâce à ces rencontres avec « l’autre » – un terme utilisé entre autres par Bill Marshall pour qualifier les peuples autochtones et les immigrants du Québec, en regard aux problématiques reliées au nationalisme québécois et aux questions d’identité[4].
C’est ainsi que nous voyons peu à peu s’esquisser les contours redessinés d’une industrie et d’un art qui prônent davantage de diversité et de collaboration dans l’élaboration de paysages cinématographiques hétérogènes, et qui amènent les cinéastes à explorer les concepts d’identité et de nation selon de nouveaux critères éthiques (mode de production) et esthétiques (narration, thématiques, etc.). En effet, que ce soit à travers des collaborations entre cinéastes en provenance d’horizons divers (par exemple Marie-Hélène Cousineau et le collectif de femmes inuites Arnait Video) ou par la création d’œuvres cherchant à faire le pont entre l’ici et l’ailleurs (Antigone de Sophie Deraspe, 2019 ; Inch’Allah, Anaïs Barbeau-Lavalette, 2012 ; Trois histoires d’Indiens, Robert Morin, 2014), le cinéma québécois et son industrie multiplient depuis quelques années les occasions de rencontres interculturelles réelles et symboliques, en les finançant davantage et en donnant une meilleure visibilité aux identités plurielles. Cette intégration de l’autre, dans les œuvres ayant vu le jour dans la dernière décennie, contribue à l’hybridation du cinéma québécois, et l’amène à se redéfinir et à élargir sa définition de qui est « Québécois », une question que se posait déjà le cinéaste Pierre Perrault en 1970 (Un pays sans bon sens).
De même, les récits nés de ces collaborations, qui se font parfois fils conducteurs entre le passé et le présent, participent à l’émergence de nouveaux questionnements sur la nation et sur l’identité composée[5] (Maalouf, 1998) engageant ainsi les nouvelles générations comme les plus âgées dans un dialogue plus large sur la mémoire culturelle (La vallée des larmes, Maryanne Zéhil, 2012 ; Incendies, Denis Villeneuve,2010).
C’est dans cette optique que Nouvelles Vues sollicite pour son 22e numéro, intitulé « Rencontres interculturelles », des propositions d’articles traitant de ces diverses collaborations entre cinéastes autochtones, cinéastes migrants et québécois, et d’une hybridation et d’un cosmopolitisme des imaginaires québécois, dans un contexte où l’identité nationale est en mutation constante, nouvelles générations aidant. Les propositions pourront traiter plus spécifiquement :
- des cinémas autochtones et/ou migrants et des partenariats/collaborations avec des cinéastes du Québec ;
- des cinémas migrants et de leur représentation de la société québécoise ;
- de la représentation des nouvelles réalités migrantes ou autochtones par des cinéastes québécois ;
- de l’hybridation du cinéma québécois et de son ouverture grandissante sur l’ailleurs, l’autre et l’altérité ;
- de la redéfinition et de l’inclusion du cinéma québécois pour inclure une plus grande diversité interculturelle et multiculturelle en son sein.
Les propositions d’article devront contenir un titre, une brève notice biographique, de même qu’un résumé d’un maximum de 500 mots. Ce résumé devra circonscrire un corpus et mettre en avant une hypothèse de travail suivant l’un des angles ou sujets mentionnés. Le tout devra être envoyé aux adresses suivantes : baillarg@umd.edu et kb162@queensu.ca au plus tard le 15 septembre 2020. Les auteurs des propositions retenues seront invités à soumettre un article rédigé en français ou en anglais et comportant entre 45 000 et 60 000 caractères, espaces comprises, au plus tard le 15 février 2021. Les articles seront soumis à un processus d’évaluation par les pairs en double aveugle, et leur publication sera conditionnelle à leur acceptation par au moins deux évaluateurs.
Bibliographie
Bachand, Denis. « Le prisme identitaire du cinéma québécois. Figures paternelles et interculturalité dans Mémoires affectives et Littoral », Cinémas, vol. 19, no 1 (automne 2008) : 57–73.
Baillargeon, Mercédès et Karine Bertrand. « Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias québécois », Contemporary French Civilization, vol. 44, nos 2–3 (2019) : 137–273.
Bertrand, Karine. « Du tiers absent au passeur de mémoire : la présence autochtone et la figure du médiateur blanc dans le cinéma des Premières Nations », Recherches Amérindiennes au Québec, vol. 45, no 1 (automne 2015) : 51–58.
Bouchard, Gérard. L’interculturalisme. Un point de vue québécois (Montréal : Éditions Boréal, 2012).
––––––. « Qu’est-ce que l’interculturalisme? », McGill Law Journal, vol. 56, no 2 (2011) : 395–434.
Coulombe, Michel. « Les anglophones et les immigrants dans le cinéma québécois : un cinéma blanc, blanc, blanc? » Ciné-Bulles, vol. 28, no 4 (automne 2010) : 34–37.
Desroches, Vincent. « L’ange de goudron : Inscriptions algériennes au Québec », The French Review, vol. 78, no 6 (2005) : 1182–1187.
Maalouf, Amin. Les identités meurtrières (Paris : Grasset, 1998).
Marshall, Bill. Quebec National Cinema (Montréal-Kingston : McGill-Queens University Press, 2001).
Poirier, Christian. « Le “renouveau” du cinéma québécois », Cités, vol. 23, no 3 (2005) : 165–182.
Santoro, Miléna. « Du rêve américain aux réalités interculturelles, ou l’américanité du cinéma d’immigration et d’immigrés au Québec », Autour de l’œuvre de Gérard Bouchard. Histoire sociale, sociologie historique, imaginaires collectifs et politiques publiques, sous la direction de Srilata Ravi et Claude Couture (Québec : Presses de l’Université Laval, 2015), 99–117.
Simon, Sherry. « The Intimate Other: Representations of Cultural Diversity in Quebec Film and Video (1985–1995) », Textualizing the Immigrant Experience in Contemporary Quebec – Contributions to the Study of World Literature, sous la direction de Susan Ireland et Patrice J. Proulx (Westport, Conn : Praeger, 200), 51–64.
Véronneau, Pierre. « Le cinéma québécois : ouverture aux cultures du monde », Les cultures du monde au miroir de l’Amérique française, sous la direction de Monique Mosey-Verrey (Québec : Presses de l’Université Laval, 2002), 209–231.
Filmographie
Barbeau-Lavalette, Anaïs. Inch’Allah, Christal, Québec, 2012.
Benoit, Jacques W. Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, Aska films, Québec, 1989.
Deraspe, Sophie. Antigone, Maison 4:3, Québec, 2019.
Jutra, Claude. À tout prendre, Claude Jutra, Québec, 1963.
Katrapani, Phyllis. Home, Amazone Films, Québec, 2002.
Lamothe, Arthur. Mémoire battante, Office national du film, Québec, 1983.
Leriche, Chloé. Avant les rues, Les Films de l’Autre, Québec, 2016.
Morin, Robert. Trois histoires d’Indiens, COOP videéo de Montréal, Québec, 2014.
Mouawad, Wajdi. Littoral, TVA films, Québec, 2004.
Perrault, Pierre. Un pays sans bon sens, Office National du Film, Québec, 1971.
Tulugarjuk, Lucy. Tia et Piujujq, Arnait Video Productions (Marie-Hélène Cousineau), Québec, 2018.
Villeneuve, Denis. Incendies, Films Séville, Québec, 2010.
Zéhil, Marianne. La vallée des larmes, Films Séville, Québec, 2011.
Notices biobibliographiques
Mercédès Baillargeon est professeure agrégée d’études françaises et francophones à l’Université du Maryland, où elle est également professeure affiliée en études des femmes et en études cinématographiques et médiatiques. Ses recherches portent principalement sur l’esthétique, l’éthique et la politique du récit à la première personne des 20e et 21e siècles, l’intersection entre les espaces et les discours publics / privés et la (dé) construction des identités personnelles et / ou collectives. Son livre, Le personnel est politique. Médias, esthétique et politique de l’autofiction chez Christine Angot, Chloé Delaume et Nelly Arcan, a été publié par Purdue University Press en 2019. Elle a également co-édité un numéro spécial de la revue Contemporary French Civilization sur « Le transnationalisme du cinéma québécois and (New) Media » avec Karine Bertrand, publiée en 2019, ainsi qu’un recueil d’essais sur la troisième vague féministe au Québec, Remous, ressacs et dérivations autour de la troisième vague féministe (Remue-ménage, 2011). Elle a publié dans les revues Québec Studies, Women in French Studies et Rocky Mountain Review, entre autres. Ses recherches actuelles explorent la question du (post / trans) nationalisme dans le cinéma québécois du nouveau millénaire.
Karine Bertrand (de descendance canadienne-française et autochtone) est professeure adjointe au département de Film and Media de Queen’s University et co-directrice du groupe de recherche AEPI (Esthétique et politique de l’image) à l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les cinémas autochtones et inuit, sur les pratiques orales cinématographiques ainsi que sur le road movie canadien et québécois. Elle est membre du Vulnerable Media Lab à Queen’s University et chercheuse principale pour le volet Arnait Video Productions (un collectif de femmes inuit) du projet Archive-Counter-Archive, financé par le CRSH. Ses plus récentes publications portent sur le rôle du témoignage dans le cinéma des femmes autochtones (Revue canadienne d’études cinématographiques, 2020) l’américanité dans le cinéma québécois (American Review of Canadian Studies, 2019) et sur le cinéma autochtone canadien et québécois (Oxford Handbook to Canadian Cinema, 2019). Elle travaille présentement sur le cinéma des femmes autochtones en Amérique et en Océanie, avec pour partenaires principaux le Wapikoni Mobile et le RICAA.
[1] Denis Bachand, « Le prisme identitaire du cinéma québécois. Figures paternelles et interculturalité dans Mémoires affectives et Littoral », Cinémas, vol. 19, no 1 (automne 2008) : 57–73.
[2] Mercédès Baillargeon et Karine Bertrand, « Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias québécois », Contemporary French Civilization, vol. 44, nos 2–3 (2019) : 137–273.
[3] Mercédès Baillargeon et Karine Bertrand, « Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias : le contexte québécois (introduction) », Contemporary French Civilization, vol. 44, nos 2–3 (2019) : 137–150.
[4] Bill Marshall, Quebec National Cinema (Montréal-Kingston : McGill-Queens University Press, 2001).
[5] Amin Maalouf, Les identités meurtrières (Paris : Grasset, 1998).
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Issue 22 (Spring 2021): Intercultural Encounters
Directed by Mercédès Baillargeon (University of Maryland) and Karine Bertrand (Queen’s University)
In an 2008 essay, Denis Bachand declared that interculturality was one of the two most prevalent tendencies in Québécois film production of the twenty-first century. As a vector of Quebec identity, it remains an issue at the forefront of Québécois culture and cinema.[1]
Indeed, if the last two decades offer numerous examples of productions which clearly engage with questions connected to multiculturalism and to Québécois identity (Littoral [dir. Wajdi Mouawad, 2004] , Home [dir. Phyllis Katrapani, 2002]), these themes have been present on Quebec screens for over sixty years, with films such as À tout prendre (dir. Claude Jutra, 1963), Mémoire battante (dir. Arthur Lamothe, 1983) and Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer (dir. Jacques Benoit, 1989). More recently, a special issue of Contemporary French Civilization reiterated this affirmation by declaring that transnationalism is more present than ever in the field of cinema in the way that Québécois cinema focuses on questions of identity, culture and identification.[2]
This phenomenon is possible through the symbolic and physical opening of internal/external Québec borders and film production. On the one hand, the last twenty-five years have seen an explosion of co-productions with countries such as France, Belgium and the United States, while on the other hand, filmmakers have gained more mobility – we can think of filmmakers such as Xavier Dolan producing films in France and the U.S. and Jean-Marc Vallée directing more than three films and one HBO series in the U.S. Additionally, the opening of borders and an increasing immigration rate have considerably changed the face and landscape of Quebec cinema. Also noticeable are the increased recognition and integration of diversity on the territory, with the emergence of Indigenous and Anglo-Montrealer cinema, for example. These new political realities are pushing Quebec forward, encouraging people and political leaders to redefine nationalism in correspondence with a deterritorialization and a broadening of cultures.[3]
It is also in this context that the last ten years has witnessed the emergence and growing popularity of Indigenous and migrant cinemas. These tend to reflect the political and social climate of a province which is spending more time questioning its role as a colonizer (Truth and Reconciliation Commission) and as a “terre d’accueil” for immigrant communities (Bouchard-Taylor Commission and Loi sur la laïcité). These have all greatly contributed to this reconfiguration of Quebec cinema, with Indigenous and migrant filmmakers positioning themselves as mediators between their land of origin and the new territory they inhabit, and between the land of their ancestors and the frontiers that stretch beyond its territory. In many cases, the works built by these filmmakers presents elements of “métissage” born through multiple encounters with the “Other” – a term used by film specialist Bill Marshall to qualify Indigenous and immigrant communities in Canada, in regard to questions of Quebec nationalism and identity.[4]
Thus, we are now seeing the redesigned contours of an industry and an art form advocating for more diversity and collaboration in the elaboration of heterogenous film landscapes, which brings filmmakers to explore identity and nation following new ethical (production modes) and aesthetic (narration, themes, etc.) criteria. Indeed, whether through collaborations between filmmakers coming from different parts of the country/province/world (for example, Marie-Hélène Cousineau and the Arnait Video collective of Inuit women) or by making films looking to create a bridge between different worlds (Antigone [dir. Sophie Deraspe, 2019], Inch’Allah [dir. Anaïs Barbeau-Lavalette, 2012] and Trois histoires d’Indiens, [dir. Robert Morin, 2014]), Québec cinema and its industry are multiplying the opportunities of intercultural encounters (real and symbolic) by financing those films and by giving plural identities better visibility. This integration of the “Other” contributes to the hybridization of Québécois cinema, getting the people and institutions to redefine and broaden the scope of its definition of “who is Québécois,” a question already present in Pierre Perrault’s 1970 documentary Un pays sans bon sens.
Furthermore, the stories born from these collaborations, sometimes gateways between past and future, participate in the elaboration of new questions in regards to the nation and “des identités composées” (Maalouf, 1998), which engages older and new generations to participate in a broader dialogue on cultural memory (La vallée des larmes [dir. Maryanne Zéhil, 2012] and Incendies, [dir.Denis Villeneuve,2010]).
It is with this in mind that Nouvelles Vues is soliciting proposals for articles addressing these diverse collaborations between Indigenous, migrant and Québécois filmmakers and stories for its 22nd number entitled “Intercultural Encounters.” The journal also invites proposals investigating cosmopolitanism and the hybridization of Québécois imaginaries, in a context where national identity is in permanent mutation. Possible topics may include:
- Indigenous or migrant cinemas and collaborations with Québécois filmmakers;
- Migrants cinemas and their representation of Québec society;
- The representation of new migrant or Indigenous realities by Québec filmmakers;
- The hybridization of Québec cinema and its opening of borders (alterity, the Other, diasporas, transnationalism);
- The redefinition and inclusion of Québec cinema in its quest to include a larger intercultural and multicultural diversity in its works;
The submissions must include a title, a brief biography as well as an abstract of a maximum of 500 words. The abstract must delineate a corpus and put forward a thesis following one the angles or subjects suggested. The submission can be sent to baillarg@umd.edu and kb162@queensu.ca by September 15, 2020. The authors whose submissions are accepted will have to submit their article (written in English or French) of 45,000 to 60,000 characters, spaces included, by February 15, 2021. The articles will be submitted to a double-blind peer-review process, and their publication will by conditional to their acceptance by at least two reviewers.
Bibliography
Bachand, Denis. “Le prisme identitaire du cinéma québécois. Figures paternelles et interculturalité dans Mémoires affectives et Littoral,” Cinémas, Vol. 19, no 1 (fall 2008): 57–73.
Baillargeon, Mercédès et Karine Bertrand. “Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias québécois,” Contemporary French Civilization, Vol. 44, nos 2–3 (2019): 137–273.
Bertrand, Karine. “Du tiers absent au passeur de mémoire : la présence autochtone et la figure du médiateur blanc dans le cinéma des Premières Nations,” Recherches Amérindiennes au Québec, Vol. 45, no 1 (fall 2015): 51–58.
Bouchard, Gérard. L’interculturalisme. Un point de vue québécois (Montréal: Éditions Boréal, 2012).
––––––. “Qu’est-ce que l’interculturalisme?,” McGill Law Journal, Vol. 56, no 2 (2011): 395–434.
Coulombe, Michel. “Les anglophones et les immigrants dans le cinéma québécois: un cinéma blanc, blanc, blanc?,” Ciné-Bulles, Vol. 28, no 4 (fall 2010): 34–37.
Desroches, Vincent. “L’ange de goudron: Inscriptions algériennes au Québec,” The French Review, Vol. 78, no 6 (2005): 1182–1187.
Maalouf, Amin. Les identités meurtrières (Paris: Grasset, 1998).
Marshall, Bill. Quebec National Cinema (Montréal-Kingston: McGill-Queens University Press, 2001).
Poirier, Christian. “Le ‘renouveau’ du cinéma québécois,” Cités, Vol. 23, no 3 (2005): 165–182.
Santoro, Miléna. “Du rêve américain aux réalités interculturelles, ou l’américanité du cinéma d’immigration et d’immigrés au Québec,” Autour de l’œuvre de Gérard Bouchard. Histoire sociale, sociologie historique, imaginaires collectifs et politiques publiques, Srilata Ravi and Claude Couture, eds. (Québec City: Presses de l’Université Laval, 2015), 99–117.
Simon, Sherry. “The Intimate Other: Representations of Cultural Diversity in Quebec Film and Video (1985–1995),” Textualizing the Immigrant Experience in Contemporary Quebec – Contributions to the Study of World Literature, Susan Ireland and Patrice J. Proulx, eds. (Westport, Conn: Praeger, 200), 51–64.
Véronneau, Pierre. “Le cinéma québécois : ouverture aux cultures du monde,” Les cultures du monde au miroir de l’Amérique française, Monique Mosey-Verrey, ed. (Québec: Presses de l’Université Laval, 2002), 209–231.
Filmography
Barbeau-Lavalette, Anaïs. Inch’Allah, Christal, Québec, 2012.
Benoit, Jacques W. Comment faire l’amour avec un nègre sans se fatiguer, Aska films, Québec, 1989.
Deraspe, Sophie. Antigone, Maison 4:3, Québec, 2019.
Jutra, Claude. À tout prendre, Claude Jutra, Québec, 1963.
Katrapani, Phyllis. Home, Amazone Films, Québec, 2002.
Lamothe, Arthur. Mémoire battante, Office national du film, Québec, 1983.
Leriche, Chloé. Avant les rues, Les Films de l’Autre, Québec, 2016.
Morin, Robert. Trois histoires d’Indiens, COOP videéo de Montréal, Québec, 2014.
Mouawad, Wajdi. Littoral, TVA films, Québec, 2004.
Perrault, Pierre. Un pays sans bon sens, Office National du Film, Québec, 1971.
Tulugarjuk, Lucy. Tia et Piujujq, Arnait Video Productions (Marie-Hélène Cousineau), Québec, 2018.
Villeneuve, Denis. Incendies, Films Séville, Québec, 2010.
Zéhil, Marianne. La vallée des larmes, Films Séville, Québec, 2011.
Bios
Mercédès Baillargeon is Associate Professor of French and Francophone Studies in the School of Languages, Literatures, and Cultures at the University of Maryland, where she is also affiliate faculty in Women’s Studies and Cinema & Media Studies. Her research mainly focuses on the aesthetics, ethics and politics of 20th and 21st century first-person narrative, the intersection between public/private spaces and discourses, and the (de)construction of personal and/or collective identities. Her book, Le personnel est politique. Médias, esthétique et politique de l’autofiction chez Christine Angot, Chloé Delaume et Nelly Arcan was published by Purdue University Press, in 2019. She has also co-edited a special issue of the journal Contemporary French Civilization on “The Transnationalism of Québec Cinema and (New) Media” with Karine Bertrand, published in 2019, and well as a collection of essays on third wave feminism in Québec, Remous, ressacs et dérivations autour de la troisième vague féministe, in 2011. She has published in the journals Québec Studies, Women in French Studies, and Rocky Mountain Review, amongst others. Her current research explores the question of (post/trans)nationalism in Québec cinema of the new millennium.
Karine Bertrand
is an assistant professor of French Canadian and Indigenous ancestry (Québec,
Algonquin) in the Film and Media department of Queen’s University. Her research
interests are centered around Indigenous film and poetry, Quebec cinema, road
movies, transnational cinemas and oral practices of cinema. She is a member of
the Vulnerable Media Lab at Queen’s and lead researcher for the Archive Counter
Archive research project (financed by SSHRC) working with the Arnait Video
Productions collective of Inuit women. Her latest publications include an
article on Indigenous women and testimonies (Canadian Journal of Film Studies,
2020) on Québécois cinema and Américanité (American Review of Canadian
Studies, 2019) and a book chapter on Canadian and Québécois Indigenous
cinemas (Oxford Handbook to Canadian Cinema, 2019). She is presently working on a project
involving the creation of an international network for Indigenous women
filmmakers, with her partners from the Wapikoni Mobile and the INAAC (the
International Network for Aboriginal Audio-Visual Creation).
[1] Denis Bachand, “Le prisme identitaire du cinéma québécois. Figures paternelles et interculturalité dans Mémoires affectives et Littoral,” Cinémas, Vol. 19, no 1 (fall 2008): 57–73.
[2] Mercédès Baillargeon and Karine Bertrand, “Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias québécois,” Contemporary French Civilization, Vol. 44, nos 2–3 (2019): 137–273.
[3] Mercédès Baillargeon et Karine Bertrand, “Le transnationalisme du cinéma et des (nouveaux) médias : le contexte québécois (introduction),” Contemporary French Civilization, Vol. 44, nos 2–3 (2019): 137–150.
[4] Bill Marshall, Quebec National Cinema (Montréal-Kingston: McGill-Queens University Press, 2001).
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Numéro 21 (Automne 2020) : Mauvais genres!
Sous la direction de Louis Pelletier (Université de Montréal)
Le cinéma québécois évolue dès son origine en marge de pratiques dominantes émanant des grands centres de production cinématographique. C’est ainsi que, parmi les plus de 300 films produits entre 1906 et 1922 par le fondateur de la cinématographie québécoise, Léo-Ernest Ouimet, on ne retrouve pas plus de deux titres alignés sur les standards – hégémoniques dès la seconde décennie de l’histoire du cinéma – des fictions issues des studios français et américains. La quasi-totalité de la filmographie de Ouimet est plutôt constituée de films relevant de genres mineurs et éphémères : films de famille (Mes espérances en 1908), films locaux (Le Concours des sacs de sel [1907]), films publicitaires (savon White Rose), films éducatifs (Sauvons nos bébés [1918]), et d’actualités (les bihebdomadaires British Canadian Pathé News produites de 1919 à 1922). Les cinéastes et producteurs actifs au Québec entre les années 1920 et 1950 se consacreront de la même façon en grande majorité à des productions s’inscrivant en marge du cinéma de fiction dominant : courts métrages destinés à être présentés en complément de programme dans les salles commerciales (Gordon Sparling et l’Associated Screen News), films utilitaires ou gouvernementaux (Albert Tessier, Maurice Proulx), cinéma amateur, etc. L’émergence d’une production légitimée de films de fiction et de documentaires entre les années 1940 et 1960 ne se traduit par ailleurs pas en un désengagement des cinéastes québécois face à ces catégories marginalisées de productions. On retrouve ainsi parmi les cinéastes ayant fait rayonner la cinématographie québécoise à travers le monde un grand nombre de créateurs ayant d’abord fait leurs classes dans le monde du cinéma amateur (Claude Jutra, Michel Brault), été à l’emploi de producteurs de films utilitaires (Pierre Perrault), ou produit des films de commande (Denys Arcand, Claude Fournier) et des publicités (Gilles Carle, Jean-Claude Lauzon, Chloé Robichaud). Il importe par ailleurs de souligner que, depuis les années 1960, la rencontre du cinéma québécois et de son public s’est souvent faite autour de films relevant de genres populaires (comédies burlesques, « films de fesses ») vilipendés par la critique. L’institution cinématographique québécoise semble en effet avoir internalisé une hiérarchie exogène consacrant la suprématie du long métrage de fiction et du film d’auteur. La quasi-totalité du discours des publications cinéphiliques publiées dans la province depuis les années 1940 est de cette façon consacrée aux diverses déclinaisons du cinéma de fiction, du cinéma d’auteur, et du grand cinéma documentaire. Du côté des archives, la Cinémathèque québécoise applique toujours en 2017 une politique de conservation rejetant hors de son mandat les vastes catégories du cinéma utilitaire et du cinéma amateur.
Un retour sur les « mauvais genres » minorés, dévalués et marginalisés par l’institution cinéphilique semble donc s’imposer. D’abord, parce que ces mauvais genres s’avèrent en définitive indissociables des différentes itérations du cinéma légitimé. Gratien Gélinas expliquait à ce propos en 1942 que, dans un contexte où le financement public de la production privée était inexistant, la production de films publicitaires et éducatifs était la seule façon de faire vivre une industrie cinématographique nationale et, partant, de permettre la production de films de fiction reflétant la réalité québécoise. Soixante-quinze ans plus tard, nombreux sont les cinéastes, producteurs et techniciens québécois à alterner entre corpos, publicités, films « commerciaux » et films d’auteur. Ce retour sur les mauvais genres du cinéma québécois paraît également justifié par l’évolution des goûts et mœurs de la communauté cinéphilique québécoise qui, grâce au travail de ses aînés, n’a plus à se battre pour la reconnaissance du potentiel artistique du cinéma. La nouvelle cinéphilie décomplexée exprimée par des publications telles que Panorama-cinéma et observables dans des manifestations comme le festival Fantasia se trouve dès lors ouverte à tout un lot de productions audiovisuelles jusqu’à récemment considérées comme intouchables. Ce changement de mentalité s’opère alors que la recherche universitaire internationale s’ouvre au cinéma de genre (Joan Hawkins), au cinéma local (Vanessa Toulmin), au cinéma utilitaire (Charles Acland, Haidee Wasson, Vinzenz Hediger, Patrick Vonderau), aux différentes déclinaisons du cinéma d’exploitation ou psychotronique (Eric Schaefer), au cinéma pornographique (Linda Williams, Thomas Waugh), et au cinéma amateur (Charles Tepperman, Liz Czach, Valérie Vignaux, Benoît Turquety). La valeur et l’intérêt du vaste corpus constitué par les « mauvais genres » du cinéma semblent dès lors prendre valeur d’évidence, et cela à plus forte raison dans un contexte comme celui du Québec, où les grandes traditions du long métrage de fiction et du film d’auteur ont mis du temps à s’imposer. Il va toutefois sans dire que la juste reconnaissance de la valeur culturelle, sociale et esthétique de ces textes et pratiques négligés nécessite le développement de nouvelles grilles d’analyses, de nouveaux regards.
Nouvelles Vues sollicite pour son numéro thématique « Mauvais genres ! » des propositions d’articles traitant dans le contexte québécois de productions cinématographiques dévaluées ne relevant pas du long métrage de fiction, du cinéma d’auteur, ou de la grande tradition du cinéma documentaire. La soumission de propositions concernant les circuits de diffusions et les espaces de diffusion consacrés à ces cinémas marginaux, de même que les communautés s’étant développées autour d’eux est également fortement encouragée. Les propositions pourront traiter plus spécifiquement :
• de cinéma d’exploitation, psychotronique ou de série Z;
• de comédies populaires, et plus particulièrement de films s’inscrivant dans la tradition burlesque du Théâtre National et du Canal 10;
• de cinéma érotique ou pornographique;
• de cinéma utilitaire, et plus particulièrement de cinéma publicitaire, éducatif, industriel ou de commande;
• de cinéma amateur ou de famille;
• de films locaux (définis comme toute production dont les participants et les spectateurs sont essentiellement les mêmes);
• de newsreels et d’actualités filmées;
• de la hiérarchie des genres dans le contexte québécois;
• de la constitution d’un canon du cinéma québécois, et des exclusions que cette opération présuppose;
• de la réception et, le cas échéant, de la censure des mauvais genres du cinéma;
• des communautés de fans, de la cinéphilie alternative, et des espaces associés (les festivals Fantasia et Vitesse Lumière, les projections des Douteux et de Total Crap, etc.);
• des questions et enjeux liés à la conservation, à la diffusion et à la programmation des mauvais genres du cinéma.
Cet appel de textes est maintenant clos.