La compagnie Cinéma canadien limitée et l’émergence du cinéma catholique canadien-français (1920–1930)

Ger­main Lacasse


Introduction

Depuis une tren­taine d’années, des recherches nou­velles ont per­mis de nuan­cer les his­toires du ciné­ma qué­bé­cois anté­rieures, qui situaient ses vrais débuts au moment de la Révo­lu­tion tran­quille1. Grâce à ces études, on a notam­ment pu mon­trer que, dès les années 1920, des cinéastes comme Joseph-Arthur Homier et Jean Arsin ont ten­té de lan­cer une pro­duc­tion ciné­ma­to­gra­phique com­mer­ciale indé­pen­dante, sou­vent sou­te­nue et par­fois même ini­tiée par le popu­laire jour­nal La Presse2. Un volet impor­tant de cette ten­ta­tive demeure pour­tant mécon­nu : les catho­liques conser­va­teurs cana­diens-fran­çais, qui dia­bo­li­saient le ciné­ma, essayèrent eux aus­si de lan­cer une pro­duc­tion qu’ils pour­raient oppo­ser au ciné­ma amé­ri­cain, alors hégé­mo­nique. C’était dix ans avant que le Vati­can n’encourage une pro­duc­tion catho­lique (par l’encyclique Vigi­lan­ti Cura en 1936), qui fut réa­li­sée au Qué­bec par les prêtres-cinéastes Albert Tes­sier, Mau­rice Proulx et quelques autres entre 1935 et 1960. On peut se deman­der main­te­nant si l’œuvre de ces der­niers ne fut pas une opé­ra­tion du cler­gé des­ti­née à relan­cer par ses propres membres l’entreprise que les hommes d’affaires catho­liques ne par­vinrent pas à mener à terme pen­dant les années 1920. 

Des inves­tis­seurs catho­liques mont­réa­lais for­mèrent en 1923 une com­pa­gnie appe­lée Ciné­ma cana­dien. Sou­te­nus par le jour­nal Le Devoir, dont ils par­ta­geaient les idéaux natio­na­listes catho­liques, ils déve­lop­pèrent assez rapi­de­ment une acti­vi­té de pro­duc­tion et de dis­tri­bu­tion com­mer­ciale de ciné­ma exploi­tant le patrio­tisme cana­dien-fran­çais. Ils espé­raient sans doute que l’intense pro­pa­gande reli­gieuse contre le ciné­ma amé­ri­cain assu­re­rait le suc­cès finan­cier de leur entre­prise, mais ils oubliaient que le public qué­bé­cois était déjà aus­si for­te­ment atti­ré par celui-ci que par les valeurs de l’Église de Rome. L’article qui suit décrit la vie de cette entre­prise de ciné­ma et vise à élar­gir le savoir his­to­rique sur la longue et spas­mo­dique ges­ta­tion de cette indus­trie au Qué­bec avant les années 1960. Il met éga­le­ment au jour le rôle qu’y joua l’Église catho­lique, qui ajou­ta à sa fonc­tion de cen­seur sévère celle de pro­mo­teur finan­cier influent.

Le Vatican et le cinéma

Le Vati­can devint sen­sible à la ques­tion du ciné­ma dès son appa­ri­tion et fut assez tôt per­sua­dé de la néces­si­té de pro­duire des films pro­pa­geant les valeurs chré­tiennes. Les entre­pre­neurs catho­liques fran­çais agirent très tôt dans cette direc­tion : l’organisation La Bonne Presse créa dès 1896 un ser­vice de « pro­jec­tions lumi­neuses », lan­ça en 1903 la revue Le Fas­ci­na­teur et réa­li­sa, sous la direc­tion de Georges-Michel Cois­sac, plu­sieurs films sur des sujets reli­gieux avant 19143. On vit aus­si la créa­tion à Lyon de la socié­té Étoile-Film, des­ti­née à la pro­duc­tion et la dis­tri­bu­tion de films catho­liques, mais la guerre arrê­ta net ces pre­miers efforts, qui ne reprirent qu’à la fin des années 19204.

Au Qué­bec, quelques petites entre­prises de ciné­ma mirent en valeur leur atta­che­ment à la reli­gion catho­lique pour obte­nir les bonnes grâces du cler­gé et atteindre le public local. L’Historiographe com­pa­gnie, ani­mée par la com­tesse Marie de Kers­trat et son fils, le vicomte d’Hauterives, fit de bonnes affaires pen­dant dix ans (1897–1907) en insé­rant dans ses pro­grammes de nom­breux films reli­gieux, qu’elle mon­trait dans les écoles et les paroisses catho­liques5. À cette époque, les exploi­tants de ciné­ma devaient soi­gner leurs rela­tions avec le cler­gé catho­lique, dont l’autorité était consi­dé­rable et avait for­te­ment contri­bué au Qué­bec à la créa­tion d’une cen­sure qui van­tait sa sévé­ri­té, comme l’a bien décrit Yves Lever6. Même le cinéaste pion­nier Léo-Ernest Oui­met, hon­ni par le cler­gé de Mont­réal parce qu’il pro­je­tait des films le dimanche, fit en 1910 un grand docu­men­taire sur le Congrès Eucha­ris­tique inter­na­tio­nal de Mont­réal pour essayer d’améliorer ses rela­tions avec les repré­sen­tants locaux du Vati­can. Para­doxa­le­ment réa­li­sé par un cinéaste qui menait une lutte juri­dique contre l’opposition du cler­gé aux nou­veaux loi­sirs de masse, ce fut pro­ba­ble­ment le seul film d’envergure à sujet reli­gieux tour­né au Qué­bec avant les années 19207.

Plu­sieurs films à sujet reli­gieux ou biblique furent tour­nés dans dif­fé­rents pays pen­dant les années 1910, mais par des com­pa­gnies pri­vées et en dehors du contrôle de l’Église catho­lique. En 1919 fut créé en Ita­lie l’Institut du film San Mar­co, imi­té assez rapi­de­ment aux États-Unis par Sacred Films, Bible Film Co., Reli­gious Motion Pic­ture Foun­da­tion, etc8. Du côté de la dis­tri­bu­tion, les choses bou­gèrent davan­tage, plu­sieurs pays ayant créé des réseaux de salles catho­liques de ciné­ma assez nom­breuses, Dimi­tri Vezy­ro­glou citant le chiffre de 1 500 pour la France seule­ment. On y pro­je­tait des films sou­vent choi­sis par le curé de la paroisse, qui s’en fai­sait par­fois le com­men­ta­teur. Sti­mu­lé et pres­sé par les ani­ma­teurs catho­liques, et en par­ti­cu­lier par ceux fran­çais, le Vati­can s’activa enfin vers la fin des années 1920 pour agir posi­ti­ve­ment sur le ciné­ma et mit sur pied en 1928 l’Office catho­lique inter­na­tio­nal du ciné­ma (OCIC)9.

Au Qué­bec, des entre­prises et des films dési­gnés par l’expression « Le bon ciné­ma » appa­rurent assez tôt dans le contexte d’un fort mou­ve­ment de réac­tion face au ciné­ma amé­ri­cain, jugé immo­ral. Les pre­mières actions réac­tives furent cepen­dant ins­pi­rées par une orga­ni­sa­tion, la Catho­lic Art Asso­cia­tion (CAA), lan­cée d’abord aux États-Unis dans un contexte simi­laire à celui de la com­mu­nau­té catho­lique qué­bé­coise. La CAA fut fon­dée et incor­po­rée à Rich­mond en Vir­gi­nie en 1917 avec un capi­tal de un mil­lion de dol­lars par Arthur W. Brit­ton, George C. Reilly et Samuel B. Howard, tous de New York. Elle naquit après un large mou­ve­ment de pro­tes­ta­tion contre le ciné­ma trou­vé immo­ral, qui mena à la créa­tion d’une « Clean Pic­ture and Play League of Ame­ri­ca » au sein de laquelle s’impliquèrent diverses orga­ni­sa­tions reli­gieuses et civiles réfor­ma­trices10. Elle visait entre autres la pro­duc­tion de pho­to­gra­phies et de films mon­trant des évé­ne­ments pri­vés ou publics et des « scenes, acts, plays, etc.11 ».

Publi­que­ment pré­sen­tée comme une ins­ti­tu­tion pro­pa­gan­diste et didac­tique, cette orga­ni­sa­tion fut néan­moins une entre­prise visant l’obtention de pro­fits par la pro­duc­tion et la dis­tri­bu­tion de ciné­ma catho­lique. La pre­mière de ses suc­cur­sales fut fon­dée à New York par Conde B. Pal­len, pro­fes­seur de phi­lo­so­phie à Saint-Louis et fon­da­teur de la Catho­lic Ency­clo­pe­dia. En 1918, la com­pa­gnie tour­na et mit sur le mar­ché un film inti­tu­lé The Vic­tim, réa­li­sé par Joseph Leve­ring, qui racon­tait l’histoire d’un prêtre for­cé de cacher un crime avoué en confes­sion12. Elle pro­duit ensuite The Trans­gres­sor (Joseph Leve­ring, 1918) et une série d’autres films tous réa­li­sés par Oscar E. Goe­bel, soit The Eter­nal Light et The Bur­ning Ques­tion (1919), The Luring Sha­dow (1920) et The Blas­phe­mer (1921). L’entreprise semble tou­te­fois n’avoir duré que quelques années, ses men­tions dis­pa­rais­sant de la presse cor­po­ra­tive amé­ri­caine après 192513.

La Catholic Art Association au Québec

Une suc­cur­sale cana­dienne de la CAA fut mise sur pied à Mont­réal en 1921 sous la direc­tion de John J. Walsh14. Elle se mani­fes­ta d’abord à Mont­réal, le 10 octobre 1921, par la pro­jec­tion de The Vic­tim au Congress Hall. Le Devoir en fit un compte ren­du élo­gieux et annon­ça la dif­fu­sion pro­chaine de plu­sieurs autres films avec des inter­titres fran­çais pour les « salles parois­siales cana­diennes-fran­çaises15 ». Quelques jours plus tard, dans le jour­nal Le Natio­na­liste, un article van­ta cette orga­ni­sa­tion en la citant comme un exemple de ce qu’il fal­lait faire pour contrer un ciné­ma qui sapait « notre langue et notre reli­gion ». L’auteur Mar­cel Levac sug­gè­ra même qu’une orga­ni­sa­tion cana­dienne-fran­çaise sem­blable soit mise sur pied16. Quelques mois plus tard, la CAA lan­ça « des vues ani­mées de la cano­ni­sa­tion de Sainte Jeanne d’Arc pho­to­gra­phiées par la San Mar­co Film Ins­ti­tute de Rome17 ». Le pré­sident new-yor­kais de l’association, O. E. Goe­bel, visi­ta Mont­réal à cette occa­sion et se dit très fier de la suc­cur­sale cana­dienne et de « son joli béné­fice finan­cier ». Le rédac­teur du Devoir écrit qu’il « caress[a] [même] l’espoir de mettre un jour en scé­na­rio quelques pages de notre his­toire, toute illu­mi­née de la gloire de nos mis­sion­naires et des fon­da­teurs chré­tiens de pro­vinces et de villes18 ». Le Devoir fut le plus enthou­siaste pro­pa­ga­teur de cette entre­prise, qui épou­sait ses propres buts : un capi­ta­lisme natio­nal catho­lique. Il ne lui man­quait que l’épithète « cana­dienne-fran­çaise », mais le jour­nal l’appela chaque fois que l’occasion se pré­sen­ta. En sep­tembre 1922, il publia un compte ren­du élo­gieux d’un nou­veau film offert par la CAA : Le blas­phé­ma­teur. Le jour­na­liste, qui signa dis­crè­te­ment « E.S. », appré­cia notam­ment son scé­na­rio illus­trant « l’infini de beau­té que la morale du catho­li­cisme […] offre à l’art ciné­ma­to­gra­phique » mais au lieu de cette intrigue moderne, il aurait aimé pou­voir vision­ner « le Moyen-Âge et ses cathé­drales […], l’imagination d’un Miche­let cor­ri­gée par la foi […], l’histoire d’un grand pape19… »

Le Bon cinéma compagnie

Le sou­hait dif­fu­sé dans les jour­naux se concré­ti­sa peu après lorsqu’apparut une pre­mière firme cana­dienne-fran­çaise des­ti­née à la pro­duc­tion de ciné­ma de fic­tion : Le Bon ciné­ma, com­pa­gnie20. Elle fut incor­po­rée léga­le­ment le 4 décembre 1922 et la Gazette offi­cielle du Qué­bec énu­mé­ra lon­gue­ment ses buts et pré­ro­ga­tives : « Fabri­quer, ache­ter, vendre, et géné­ra­le­ment faire le com­merce de pel­li­cules, vues ain­si que de toutes les autres sortes d’œuvres pho­to­gra­phiques21. » Un de ses fon­da­teurs, Samuel Gre­nier, aurait aupa­ra­vant fait par­tie de la CAA ; les autres étaient des entre­pre­neurs catho­liques : Édouard Garié­py, direc­teur de la librai­rie sco­laire Gran­ger Frères ; Hen­ri Gri­sé, impri­meur et libraire à Saint-Césaire ; Arthur Larente, gérant à Mont­réal pour Pathé Film ; et Joseph-Arthur Homier, pho­to­graphe et cinéaste ama­teur. Ils annon­cèrent le lan­ce­ment pro­chain de Made­leine de Ver­chères (Joseph-Arthur Homier, 1922), « un pre­mier pas vers la pro­duc­tion de vues essen­tiel­le­ment cana­diennes22 », qui fut effec­ti­ve­ment lan­cé peu après l’incorporation légale de la com­pa­gnie. Le film fut accueilli avec enthou­siasme par la cri­tique et le public, qui appré­cièrent son aspect réa­liste et didac­tique. S’il répon­dait aux attentes de ceux qui vou­laient voir le ciné­ma natio­nal se démar­quer du ciné­ma amé­ri­cain, Made­leine de Ver­chères semble pour­tant avoir été assez peu asso­cié à la morale catho­lique, si ce n’est que le scé­na­rio était adap­té du roman d’un prêtre cana­dien-fran­çais, l’abbé Baillar­gé, et que la publi­ci­té du film fai­sait de Made­leine de Ver­chères la « Jeanne d’Arc du Cana­da23 ». Après la pro­duc­tion de ce film, J.-A. Homier quit­ta Le Bon ciné­ma et réa­li­sa avec Emma Gen­dron un mélo­drame à intrigue poli­cière (La drogue fatale, 1924)24. Made­leine de Ver­chères fut la seule fic­tion tour­née à cette époque qui cor­res­pon­dait aux buts énon­cés par les théo­ri­ciens et les pra­ti­ciens de ce pro­jet de ciné­ma catho­lique canadien-français.

Le Cinéma canadien

Après la pro­duc­tion de Made­leine de Ver­chères, Homier et Larente quit­tèrent la com­pa­gnie dans des cir­cons­tances et pour des rai­sons incon­nues. Les autres asso­ciés pour­sui­virent les mêmes objec­tifs, mais en s’associant sous un nou­veau nom : Le Ciné­ma cana­dien25. Le « bon » devint ain­si le « cana­dien », une modi­fi­ca­tion qui connote le patrio­tisme tant reli­gieux que natio­nal de cette époque. Les publi­ci­tés de la firme men­tion­nèrent encore Made­leine de Ver­chères, mais en attri­buèrent par­fois la réa­li­sa­tion à Samuel-Théo­dore Gre­nier, ce qui laisse croire que la rela­tion avec Homier n’était plus très cor­diale à la suite de son départ26. L’entreprise ins­tal­la ses bureaux sur la rue Saint-Jacques en 1923 et démé­na­gea sur la rue Champ de Mars en 192627.

Le jour­nal Le Devoir, qui fut un fidèle sou­tien et col­la­bo­ra­teur de cette autre entre­prise, publia en 1924 un très long article décri­vant son activité :

Le Ciné­ma cana­dien est une com­pa­gnie à res­pon­sa­bi­li­té limi­tée dont les lettres patentes, obte­nues au Qué­bec, auto­risent un capi­tal-actions de $ 50,000. Le conseil d’administration est ain­si consti­tué : pré­sident, M. Édouard Garié­py, gérant de la mai­son Gran­ger ; vice-pré­sident, M. Hen­ri Gri­sé, libraire à Saint-Césaire ; secré­taire, Mlle Auro­ra-Rosan­na Thi­bault, scé­na­riste ; tré­so­rier, M. Jos-Auguste Papi­neau, de Corn­wall ; direc­teurs, MM. Charles Qué­ry et Samuel-Théo­dore Gre­nier. Ce der­nier est en même temps le chef ciné­gra­phiste de l’entreprise28.

L’occupation anté­rieure de Samuel Gre­nier n’est pas indi­quée mais on sait par les jour­naux qu’il fut plus tard chef de rayon pen­dant 21 ans chez Dupuis Frères, à Mont­réal29. Il avait été embau­ché en tant qu’acheteur « au rayon des objets de pié­té » et, au moment de son décès, il était l’un des direc­teurs de l’Association des mar­chands détaillants d’articles de reli­gion de la pro­vince de Qué­bec30. Aucune pré­ci­sion n’est ajou­tée sur l’activité de Charles Qué­ry, mais d’autres jour­naux nous apprennent qu’il était un agent d’assurances à l’emploi de la firme La Sau­ve­garde et qu’il était aus­si un orga­ni­sa­teur libé­ral hyper­ac­tif31. À l’époque de la for­ma­tion de Ciné­ma cana­dien, il tra­vaillait pour mous­ser la can­di­da­ture de Joseph-Édouard Per­rault, ministre de la colo­ni­sa­tion, des mines et des pêche­ries32. Chez les par­ti­sans libé­raux, on pen­sait que Qué­ry était un ora­teur per­sua­sif : « Puis vint M. Charles Qué­ry de Mont­réal, l’orateur aimé des foules et le cham­pion du libé­ra­lisme dans tout le dis­trict de Mont­réal. […] Sa parole chaude et convain­cante fit vibrer sou­ventes fois l’auditoire33. » Ses rela­tions influentes expliquent en par­tie les com­mandes gou­ver­ne­men­tales que la com­pa­gnie obtien­dra rapi­de­ment après sa fon­da­tion. Garié­py et Gri­sé, tous deux actifs dans le domaine du com­merce des livres, avaient quant à eux un bon réseau de rela­tions dans le monde de l’éducation, alors presque entiè­re­ment contrô­lé par le cler­gé. Garié­py fut plus tard pré­sident de l’Association des impor­ta­teurs cana­diens et Gri­sé devint maire de Saint-Césaire34. La plu­part des fon­da­teurs de Ciné­ma cana­dien étaient donc des hommes actifs dans les domaines com­mer­ciaux liés aux milieux catho­liques, le plus exem­plaire en ce sens étant Samuel Grenier.

Premiers films (1923)

C’est peut-être parce qu’ils dou­taient de la ren­ta­bi­li­té des fic­tions cana­diennes-fran­çaises que les asso­ciés d’Homier s’en sépa­rèrent pour for­mer une autre com­pa­gnie. Ils l’avouèrent même plus tard : « Cepen­dant le film avec scé­na­rio coûte très cher et le Ciné­ma cana­dien n’a pas encore ten­té une seconde expé­rience. […] Pour le pré­sent, le Ciné­ma cana­dien s’en tient à des pel­li­cules édu­ca­tion­nelles et docu­men­taires35. » On en apprend plus sur les pre­miers films pro­duits par cette com­pa­gnie grâce à un compte ren­du publié dans La Presse en 1923. Celui-ci rap­porte une impor­tante pro­jec­tion faite par Qué­ry et Gre­nier devant les dépu­tés et des citoyens au Par­le­ment de Qué­bec le 19 décembre de la même année36. Il est écrit que les films furent pré­pa­rés à la demande de divers minis­tères dans le but de faire connaître le Qué­bec par des pro­jec­tions aux États-Unis et en Europe (France, Angle­terre, Bel­gique et Suisse) : « Le film nous montre […] tous les avan­tages dont nous béné­fi­cions au point de vue de la navi­ga­tion. […] D’autres scènes nous montrent les pro­grès de la Colo­ni­sa­tion [sic] et nous fait [sic] voir quelques coins inté­res­sants de la région du Lac Saint-Jean37. » Aucun titre n’est men­tion­né pour les films pro­je­tés à cette occa­sion, mais les des­crip­tions trou­vées ailleurs montrent qu’ils étaient assez éloi­gnés des thèmes reli­gieux ou édi­fiants décrits dans les publi­ci­tés et objec­tifs de la firme et illus­trés par Made­leine de Ver­chères. Ils cor­res­pon­daient beau­coup plus à ce qui inté­res­sait le gou­ver­ne­ment du Qué­bec depuis quelques années : des docu­men­taires édu­ca­tifs ou pro­pa­gan­distes. Le compte ren­du de la pro­jec­tion au Par­le­ment ajoute que

[l]e deuxième film nous fait voir toute la magni­fi­cence des routes de la pro­vince […] [et] tout le pro­grès accom­pli dans notre pro­vince sous le rap­port de l’éducation. […] [Il pré­sente des] vues superbes de l’École Nor­male Jacques-Car­tier, de plu­sieurs écoles de nos cam­pagnes […] [ain­si qu’]une superbe vue de tous les sites entre Qué­bec et le Sague­nay […]. Le der­nier film montre plu­sieurs vues de la vieille capi­tale38.

L’article se conclut sur une men­tion de la satis­fac­tion de l’assistance à la suite du vision­ne­ment et ajoute que « [c]es films sont mon­tés avec beau­coup de soin, et [que] l’on appré­cie sur­tout le côté artis­tique qui a été soi­gné d’une façon particulière ».

Dans un long article tra­çant le por­trait de la com­pa­gnie, le jour­na­liste du Devoir Émile Benoist dres­sa en 1924 une autre liste de titres et une courte des­crip­tion des films tour­nés par celle-ci :

Ses der­nières pro­duc­tions ont été […] Qué­bec pays du sou­ve­nir. (5 rou­leaux). La colo­ni­sa­tion au Lac St-Jean. Les bonnes routes, Mont­réal et l’éducation. De Qué­bec au Sague­nay et Qué­bec ancien et moderne. De Mont­réal à Ste-Agathe. (2 rou­leaux). Régions des Lau­ren­tides. Réa­li­sé pour le minis­tère de la voi­rie pro­vin­ciale. L’Outaouais supé­rieur et le Témis­ca­mingue. (2 rou­leaux). Réa­li­sé pour le minis­tère des terres et forêts39.

Ces trois titres et leurs résu­més cor­res­pondent en par­tie aux élé­ments men­tion­nés dans la pro­jec­tion au Par­le­ment de Qué­bec de décembre 1923, mais les élé­ments concer­nant les Lau­ren­tides, l’Outaouais et le Témis­ca­mingue sont nou­veaux et ont pro­ba­ble­ment été fil­més en 1924. Le film inti­tu­lé De Mont­réal à Ste Agathe fit d’ailleurs l’objet d’une autre pro­jec­tion pour les dépu­tés au Par­le­ment de Qué­bec le 19 février 192540. La com­mande gou­ver­ne­men­tale s’avéra ain­si tout de même assez consi­dé­rable, ce qui laisse sup­po­ser que Ciné­ma cana­dien fit un lob­bying impor­tant ou convain­cant et en tira un bon bénéfice.

La com­pa­gnie pour­sui­vit sur cette lan­cée l’année sui­vante (1924) en pro­dui­sant un autre film com­man­dé par le secré­ta­riat de la pro­vince pour le compte de l’Université de Mont­réal (UdeM) : « Les éli­mi­na­toires des olym­piades. (2 rou­leaux). Exer­cices ath­lé­tiques, posés au ralen­ti et à la vitesse nor­male, des ath­lètes cana­diens envoyés à Paris. Offert par le secré­taire pro­vin­cial à l’Université de Mont­réal41. » Il s’agit d’un film mon­trant des com­pé­ti­tions cana­diennes pré­pa­ra­toires pour les Jeux Olym­piques de 1924, tenus à Paris entre le 4 mai et le 27 juillet. Il fut pro­ba­ble­ment tour­né le 4 avril 1924 lors d’une com­pé­ti­tion au Monu­ment Natio­nal sous l’égide de l’Association ath­lé­tique de l’UdeM42. Une par­tie de la com­pé­ti­tion était inti­tu­lée « Éli­mi­na­toires des Jeux olym­piques », ce qui cor­res­pond au titre du film. La haute direc­tion de l’UdeM assis­ta à la soi­rée de com­pé­ti­tion (le rec­teur Mgr Piette, le secré­taire géné­ral Édouard Mont­pe­tit, etc.) en com­pa­gnie de M. Atha­nase David, secré­taire de la pro­vince, et Le Devoir consa­cra un très long repor­tage à cette soi­rée, énu­mé­rant les par­ti­ci­pants et les gagnants de toutes les épreuves (course, boxe, lutte, escrime)43. Outre la men­tion dans l’article d’Émile Benoist, aucune autre trace de ce film n’est pré­sente dans les jour­naux. Le film, qui per­met­trait sûre­ment de docu­men­ter la pra­tique de l’athlétisme uni­ver­si­taire à cette époque, com­porte éga­le­ment un aspect tech­nique inté­res­sant : des seg­ments ont été tour­nés au ralen­ti pour mieux mon­trer la per­for­mance des athlètes.

Figure 1 : Caricature de La Presse (4 avril 1924, p. 18) illustrant la compétition des athlètes universitaires et la présence de notables invités.
Figure 1 : Cari­ca­ture de La Presse (4 avril 1924, p. 18) illus­trant la com­pé­ti­tion des ath­lètes uni­ver­si­taires et la pré­sence de notables invités.

Quant à la dis­tri­bu­tion de ses films, Ciné­ma cana­dien défi­nit des cré­neaux assez pré­cis en dehors des cir­cuits com­mer­ciaux : « La com­pa­gnie ne tient pas plus que cela à la loca­tion de ses films dans les théâtres, à moins que ce soit dans des théâtres recom­man­dés par le cler­gé. Elle tient plu­tôt à la clien­tèle des orga­ni­sa­tions parois­siales. Les pel­li­cules fran­çaises qu’elle offre sont abso­lu­ment irré­pro­chables44. » Les affaires de l’entreprise semblent d’ailleurs avoir été pros­pères et pro­met­teuses, car Ciné­ma cana­dien entre­prit en 1924 une ambi­tieuse cam­pagne de vente d’actions, avec « un pla­ce­ment d’une belle marge de sécu­ri­té : ses actions pri­vi­lé­giées à 8% 45».

Plu­sieurs annonces insis­tant sur les com­mandes nom­breuses et le besoin de capi­tal paraissent ain­si dans Le Devoir au prin­temps 1924, dont une inti­tu­lée « Le Ciné­ma cana­dien n’est pas un bluff46 » sera confir­mée par les quelques pro­duc­tions un peu plus ambi­tieuses réa­li­sées dans les mois sui­vants et décrites ci-après.

Ce que l’Amérique doit à la race française (Samuel Grenier, 1924)

La pro­duc­tion qui sui­vit Les éli­mi­na­toires des olym­piades était rela­ti­ve­ment ambi­tieuse et cor­res­pon­dait davan­tage aux objec­tifs pour­sui­vis par Ciné­ma cana­dien, qui affi­chait sans cesse ses visées natio­na­listes et catho­liques. Inti­tu­lé Ce que l’Amérique doit à la race fran­çaise, le film repro­dui­sait une parade tenue à Mont­réal le 24 juin 1924 à l’occasion de la fête de la Saint-Jean-Bap­tiste. Pour sou­li­gner son 90e anni­ver­saire, la Socié­té Saint-Jean-Bap­tiste de Mont­réal (SSJBM) avait effec­ti­ve­ment conçu un défi­lé rap­pe­lant l’histoire de la Nou­velle-France et insis­tant sur le rôle impor­tant qu’y jouèrent l’Église catho­lique et ses repré­sen­tants47. Le Devoir four­nit le jour même une liste com­plète des chars allégoriques :

Jacques Car­tier explore le St-Laurent ; Fon­da­tion de Port Royal; Cham­plain à Qué­bec […][;] [F]ondation de Mont­réal ; Jeanne Mance ; des gou­ver­neurs de la Nou­velle-France […][;] Cave­lier de La Salle ; Iber­ville et Bien­ville ; La Véren­drye ; […] Papi­neau et La Fon­taine ; pro­vinces du Cana­da ; Duver­nay ; Saint Jean-Bap­tiste48.

La pre­mière eut lieu le 27 jan­vier 1925 au Monu­ment-Natio­nal. Elle fut sui­vie d’une pro­jec­tion du film fran­çais L’obstacle (Jean Kemm, 1918) et d’une confé­rence de Vic­tor Morin sur l’histoire de la SSJBM49. Le Devoir ren­dit compte de la pro­jec­tion avec un enthou­siasme débor­dant : « La pro­ces­sion déroule dans l’ordre chro­no­lo­gique, les grands gestes de notre race dans le Nou­veau Monde. Elle nous montre nos aïeux, race de gen­tils­hommes affa­més de gloire et d’idéal chré­tien, mépri­sant l’or pour ten­ter d’étendre le règne de la civi­li­sa­tion. » Le reste de l’article est moins dithy­ram­bique, mais il donne à lire quelques détails sur le film : « Le Ciné­ma cana­dien a exé­cu­té la ciné­ma­to­gra­phie à la per­fec­tion. Tous les détails sont d’une grande net­te­té […]. En plus les expli­ca­tions suc­cintes [sic] mais très com­plètes qu’il a insé­rées pour l’explication de chaque tableau, rendent le défi­lé encore plus vivant50. »

Le film fut annon­cé et dis­tri­bué pen­dant quelques années dans le réseau d’institutions catho­liques. Une copie du film aurait été ache­tée par « M. Har­kin, com­mis­saire des parcs natio­naux […]. Son inten­tion [était] de le faire repré­sen­ter et cir­cu­ler dans toutes les par­ties du Cana­da, afin de faire revivre des sou­ve­nirs his­to­riques et d’instruire le peuple51. » Plus tard, la SSJBM indi­que­ra que son comi­té de pro­pa­gande avait fait cir­cu­ler le film aux États-Unis dans les com­mu­nau­tés cana­diennes-fran­çaises pour « les ame­ner à assis­ter à la célé­bra­tion de notre fête natio­nale à Mont­réal52 ». Le film est aujourd’hui introu­vable. En 1926, la SSJBM publia un livre com­mé­mo­ra­tif rap­pe­lant ce défi­lé et celui de 1925 (aus­si fil­mé par Ciné­ma cana­dien), dans lequel on retrouve des illus­tra­tions et des expli­ca­tions décri­vant cha­cun des chars allé­go­riques ayant pris part au défi­lé. Ce docu­ment donne une idée de ce que pou­vait mon­trer et évo­quer le film. De nom­breuses pho­tos de l’événement ont aus­si été conservées.

Figure 2 : Char allégorique rendant hommage à Ludger Duvernay, fondateur de la SSJBM. Source : http://aqction.info/evenement/1924/2013-06-24/
Figure 2 : Char allé­go­rique ren­dant hom­mage à Lud­ger Duver­nay, fon­da­teur de la SSJBM. Source : http://aqction.info/evenement/1924/2013–06-24/

Voyage du Devoir en Acadie (Samuel Grenier et Édouard Gariépy, 1924)

Le plus connu et le plus com­men­té des films faits par Ciné­ma cana­dien est un docu­men­taire racon­tant un voyage patrio­tique orga­ni­sé par le jour­nal Le Devoir en Aca­die. Ce pro­jet cor­res­pon­dait aux buts com­muns des deux entre­prises : le jour­nal était en quelque sorte le théo­ri­cien et le pro­pa­ga­teur de Ciné­ma cana­dien et son direc­teur Hen­ri Bou­ras­sa était l’un des plus ardents défen­seurs du capi­ta­lisme catho­lique cana­dien-fran­çais. C’est dans cet esprit qu’il pro­po­sa en 1924 l’organisation d’un pèle­ri­nage en Aca­die, lequel devait per­mettre l’intensification des liens entre Qué­bé­cois et Aca­diens par la visite de lieux his­to­riques impor­tants dans l’histoire de ces der­niers. 271 notables (prêtres, avo­cats, dépu­tés, etc.) du Qué­bec et du Cana­da fran­çais furent recru­tés pour ce voyage, qui fut fait par train de Mont­réal jusqu’en Nou­velle-Écosse en pas­sant par Grand-Pré53. La pro­pa­gande prit rapi­de­ment autant d’importance que le pèle­ri­nage. Le jour­nal assu­ra une cou­ver­ture totale de l’événement et décrit en détail tous ses faits, depuis l’annonce du pro­jet jusqu’au retour des voya­geurs à Mont­réal et au lan­ce­ment du film.

Le voyage se dérou­la du 17 au 23 août 1924. Ses étapes furent : Edmund­ston, Grand-Pré, Saint-Ber­nard, Pub­ni­co, Hali­fax, enfin Monc­ton (atteint le 21 août), puis le retour par la val­lée de la Mata­pé­dia pour ren­trer à Mont­réal le 23 août. Plu­sieurs étapes com­por­tèrent de courtes visites en auto­mo­bile dans d’autres vil­lages des envi­rons (She­diac, Anna­po­lis, etc.), où les voya­geurs furent ame­nés par des hôtes aca­diens nom­breux et enthou­siastes. Le pro­gramme fut par­tout assez simi­laire : les Aca­diens, pré­pa­rés depuis long­temps, atten­daient les visi­teurs, puis leur fai­saient visi­ter les lieux, bâti­ments et monu­ments impor­tants de l’histoire aca­dienne. Les notables locaux, maires, curés, etc., firent des dis­cours de bien­ve­nue, aux­quels Bou­ras­sa répon­dit chaque fois par un éloge de la sur­vi­vance cana­dienne-fran­çaise et aca­dienne. Il cher­chait par là à rap­pe­ler élo­quem­ment le pas­sé afin de sti­mu­ler la coopé­ra­tion entre les deux peuples dans le futur :

M. Bou­ras­sa répé­ta que nous devons être unis tout d’abord dans la foi et dans l’Église ; entre la popu­la­tion cana­dienne-fran­çaise et la popu­la­tion aca­dienne il y a d’autres liens qui doivent être res­ser­rés davan­tage, mais c’est dans la foi en une nation cana­dienne que tous les grou­pe­ments doivent recher­cher l’idéal com­mun qui fera une nation forte et unie54.

Le tour­nage du film fut décrit avec beau­coup de détails au moment de son lan­ce­ment en décembre 1924. Émile Benoist en parle lon­gue­ment dans son article sur Ciné­ma canadien :

Le 15 août der­nier, deux ciné­gra­phistes, M. Gre­nier et M. Édouard Garié­py, par­taient avec les excur­sion­nistes du Devoir. […] À chaque arrêt en cours de route, les ciné­gra­phistes tour­nèrent conscien­cieu­se­ment. En pareil cas le ciné­gra­phiste est comme un nou­vel­liste. Il n’est pas le maître des cir­cons­tances; il doit se confor­mer à celles-ci. […] Il s’installe sur la loco­mo­tive ou dans un wagon à bagage [sic] pour mieux voir. Pen­dant que le ciné­gra­phiste tourne, son com­pa­gnon repère les per­son­nages, les pay­sages, les scènes à enre­gis­trer. […] Afin de prendre des vues des mon­tagnes, les deux ciné­gra­phistes s’étaient ins­tal­lés sur le devant de la loco­mo­tive avec leur appa­reil. Il va sans dire qu’ils étaient soli­de­ment ligo­tés, hors les mains. Et ils tour­nèrent du film pen­dant que le convoi allait à une allure de 60 et même de 70 milles à l’heure55.

Ain­si, à cha­cune des étapes de leur périple, Gre­nier et Garié­py prirent de nom­breuses pho­tos et fil­mèrent les élé­ments les plus signi­fi­ca­tifs. Le film est aujourd’hui dis­pa­ru, mais une série de 50 pho­tos ven­dues jadis par le jour­nal peut consti­tuer un résu­mé visuel de son conte­nu : on y voit les foules devant les églises, les gares, les monu­ments, Bou­ras­sa pro­non­çant des dis­cours, etc.56 Les cinéastes, qui ne pou­vaient enre­gis­trer aucun son, se consa­craient sur­tout sur la prise d’images mon­trant les endroits visi­tés et les per­sonnes ren­con­trées, des élé­ments qui pou­vaient ensuite être iden­ti­fiés par des inter­titres ou par un com­men­taire ver­bal. L’importance de ce film pour les gens du jour­nal peut être mesu­rée par le voyage addi­tion­nel que firent un peu plus tard les cinéastes pour enre­gis­trer cer­taines images, trou­vées man­quantes après un pre­mier montage.

Figure 3 : L’Église du Souvenir de la déportation acadienne et le Monument d’Évangéline. Source : BAnQ : CP 3615
Figure 3 : L’Église du Sou­ve­nir de la dépor­ta­tion aca­dienne et le Monu­ment d’Évangéline. Source : BAnQ : CP 3615

Le film fut lan­cé en grandes pompes le 10 décembre 1924 à la salle Saint-Sul­pice, rue Saint-Denis. Il fut com­men­té par l’abbé Oli­vier Mau­rault, un pro­fes­seur de l’UdeM ayant par­ti­ci­pé à l’expédition, et des chants aca­diens, dont « Évan­gé­line », furent chan­tés à cette occa­sion par M. Signo­ri, qui avait éga­le­ment par­ti­ci­pé au voyage57. L’assistance com­por­ta évi­dem­ment un grand nombre de voya­geurs accom­pa­gnés de leurs proches. Le rédac­teur du Devoir publia un compte ren­du très long et détaillé de la pro­jec­tion, dans lequel le com­men­taire de l’abbé Mau­rault, qui semble avoir été une intro­duc­tion de cha­cune des par­ties du film et qui pour­rait ser­vir aujourd’hui de des­crip­tion du conte­nu, est résu­mé : « M. Mau­rault a rela­té ici des inci­dents qui ont mar­qué cette par­tie du voyage […]. Il a par­lé de l’église du sou­ve­nir […][,] de l’intéressant musée de Port Royal […][,] de la baie Ste-Marie par où sont reve­nus les Aca­diens58. » Il fait ensuite son propre compte ren­du de la suite du film :

On nous mon­tre­ra, au cours de cette deuxième par­tie, quelques indus­tries des Aca­diens : éle­vage du renard, pêche aux huîtres, pêche aux homards. […] Enfin, la troi­sième par­tie, c’est le retour à Qué­bec et Mont­réal par l’admirable val­lée de la Mata­pé­dia ; les remer­cie­ments et la morale de toute l’histoire59.

Dès le len­de­main, le film fut offert pour loca­tion via le jour­nal60. Plu­sieurs pro­jec­tions eurent lieu à Mont­réal dans les semaines qui sui­virent : salle Imma­cu­lée Concep­tion, École Gar­neau, Hôtel de ville de Saint-Hen­ri, Sœurs de Notre-Dame à Ver­dun, etc.61 Plu­sieurs pro­jec­tions furent aus­si pré­sen­tées dans d’autres villes, où elles furent très sou­vent accom­pa­gnées d’une confé­rence ou d’un com­men­taire : Saint-Hya­cinthe, Joliette, etc. En 1933, le jour­nal se mit à la recherche du film, mais celui-ci serait vrai­sem­bla­ble­ment dis­pa­ru après avoir été prê­té62. Il n’en fut ensuite plus jamais ques­tion, jusqu’aux fêtes du 100e anni­ver­saire du jour­nal, en 2010, où il fut men­tion­né laco­ni­que­ment. Contac­tée dans le cadre des recherches pour le pré­sent article, la direc­tion du Devoir n’a mani­fes­té aucun inté­rêt. Curieux dédain de la part d’une entre­prise plu­tôt fière de son his­toire, ou bien gêne mal pla­cée face à un pas­sé récusé ?

À la suite du suc­cès des pro­jec­tions de décembre 1924, Ciné­ma cana­dien inten­si­fia ses publi­ci­tés dans Le Devoir, qui demeu­ra son plus régu­lier annon­ceur. Le cata­logue des films dis­tri­bués s’élargit dès jan­vier 1925, mais les films pro­duits pour le compte du gou­ver­ne­ment du Qué­bec ne furent plus men­tion­nés. Les annonces dis­tin­guèrent « Nos pro­duc­tions » (par­mi les­quelles on retrouve Made­leine de Ver­chères, Ce que l’Amérique doit à la race fran­çaise et Au pays d’Évangéline, nou­veau titre pro­bable de Voyage du Devoir en Aca­die) et « Nos exclu­si­vi­tés », dont Le méde­cin du vil­lage, Dou­leurs et bon­heurs, Tout est bien qui finit bien et quelques autres titres63. L’origine de ces films est aujourd’hui dif­fi­cile à éta­blir. Cer­tains semblent avoir été pro­duits chez Pathé vers 1910, par exemple Tout est bien qui finit bien, avec le comique Max Lin­der, un film déjà bien ancien en 192664. Des pro­jec­tions sont rap­por­tées un peu par­tout : Le méde­cin du vil­lage à Saint-Jean-sur Riche­lieu en sep­tembre 1925, un pro­gramme non spé­ci­fié à Chi­cou­ti­mi, un autre dans les écoles publiques de Mont­réal, un autre encore à Joliette, où Ciné­ma cana­dien était repré­sen­té par deux agents régio­naux des­ser­vant aus­si Trois-Rivières : Louis-Phi­lippe Carette, « orga­ni­sa­teur », ain­si que Alphonse-Émile Camp­bell, « confé­ren­cier-pro­jec­tion­niste65 ».

Visions du passé (Samuel Grenier, 1925)

Le 24 juin 1925, Ciné­ma cana­dien fil­ma à nou­veau la parade de la SSJBM. La Presse annon­ça le défi­lé avec enthousiasme :

À tra­vers ces scènes de la vie d’autrefois sur­gi­ront de gra­cieuses évo­ca­tions de quelques-unes de nos char­mantes chan­sons popu­laires. Le tout forme une série homo­gène, inté­res­sante au point de vue édu­ca­tif, sans négli­ger le côté spec­tacle et à laquelle les auteurs ont don­né le joli nom de : Visions du pas­sé66.

La des­crip­tion des 35 chars allé­go­riques qui parut le len­de­main men­tion­na plu­sieurs tableaux mon­trant l’apport des femmes (« châ­te­laine, ména­gère, ins­ti­tu­trice ») ou rap­pe­lant les chan­sons popu­laires et illus­tra, comme l’année pré­cé­dente, de nom­breux élé­ments reli­gieux : « mis­sion­naires et explo­ra­teurs, l’Angelus aux champs, Jeanne Le Ber en prières, la Croix du che­min et le mois de Marie, etc.67». « Visions du pas­sé » devint le titre du film, qui cir­cu­la ensuite dans le réseau de dis­tri­bu­tion de Ciné­ma cana­dien. On en fit entre autres une pro­jec­tion pres­ti­gieuse à l’occasion de l’inauguration d’une grande soi­rée patrio­tique, quand furent reçus au Monu­ment-Natio­nal des visi­teurs cana­diens-fran­çais de l’Ouest cana­dien, « pèle­rins de la sur­vi­vance fran­çaise68 ». Les deux films des parades de la SSJBM sont aujourd’hui introuvables.

Visions du pas­sé semble avoir été le der­nier film tour­né par Ciné­ma cana­dien. La com­pa­gnie se serait ensuite res­treinte à la dis­tri­bu­tion et la pro­jec­tion de films, car les publi­ci­tés ulté­rieures ne men­tionnent aucune nou­velle pro­duc­tion. Ces seules acti­vi­tés furent sans doute peu ren­tables, car on ajou­ta bien­tôt aux annonces la pro­duc­tion de films publi­ci­taires et même l’organisation de soi­rées récréatives :

Le Ciné­ma cana­dien limi­tée orga­nise au béné­fice d’œuvres recom­man­dées des séances de ciné­ma, de folk­lore, etc., à domi­cile, dans les paroisses, les mai­sons d’enseignement, cercles, clubs, etc. […] N.B. Nous édi­tons et dis­tri­buons le film de pro­pa­gande com­mer­cial69.

La même annonce paraî­tra plus tard avec une liste de clients : Col­lège Saint-Hen­ri, Théâtre Passe-Temps, Salle Saint-Sul­pice, Hôpi­tal Saint-Jean-de-Dieu et plu­sieurs autres. Les pro­jec­tions de films de leur cata­logue furent assez sou­vent men­tion­nées dans les jour­naux locaux, par exemple Le méde­cin du vil­lage à Saint-Jean les 24 et 25 sep­tembre 1925, à Joliette les 28 et 29 sep­tembre 1925 ou Les petits héros d’Alsace à Chi­cou­ti­mi en juillet 1926. Ciné­ma cana­dien recru­tait donc encore à cette époque des agents régio­naux, les­quels géraient sur place la dis­tri­bu­tion et la pro­jec­tion des films, comme c’est le cas de L.-P. Bou­chard, qui était pré­cé­dem­ment au ser­vice de la firme de Qué­bec Le Bon Ciné­ma70 et qui s’activa au Sague­nay en 1926.

Figure 4 : Publicité publiée dans Le Devoir (17 janvier 1925) : 7.
Figure 4 : Publi­ci­té publiée dans Le Devoir (17 jan­vier 1925) : 7.

En 1925 et 1926, Ciné­ma cana­dien publia de nou­velles annonces dans Le Devoir, les­quelles offraient encore des actions de la firme et van­taient tou­jours des divi­dendes de 8 %. L’une de ces publi­ci­tés indique tou­te­fois un élar­gis­se­ment des ser­vices offerts par la com­pa­gnie : « Prise de vues, loca­tion et vente de films, ser­vice de pro­jec­tion […][,] agents et dépo­si­taires des pro­jec­teurs Acme, Zenith et Étoile […][,] lampes à pro­jec­tion Maz­da71. » On ne trouve plus aucune publi­ci­té ni infor­ma­tion sur la com­pa­gnie après l’été 1926. Elle semble avoir ces­sé brus­que­ment ses acti­vi­tés, pour des rai­sons non pré­ci­sées. On peut cepen­dant ima­gi­ner que son déclin rapide ait été entraî­né par son can­ton­ne­ment dans la pro­duc­tion docu­men­taire, par son refus de s’adapter à la venue pro­chaine du ciné­ma sonore ou encore par sa limi­ta­tion gra­duelle à la dis­tri­bu­tion non com­mer­ciale de films étrangers.

L’année 1927 fut très mau­vaise pour l’industrie du ciné­ma au Qué­bec. L’incendie tra­gique du ciné­ma Lau­rier Palace, qui se pro­dui­sit en jan­vier 1927, amor­ça notam­ment une contro­verse qui inten­si­fia les pré­ju­gés des milieux catho­liques contre le ciné­ma. Ciné­ma cana­dien échap­pait pour­tant à ces soup­çons et aux inter­dits qui les accom­pa­gnaient, la com­pa­gnie ne dif­fu­sant que des films consen­suels vers des publics choi­sis et dans des salles non com­mer­ciales. D’autres rai­sons peuvent ain­si être convo­quées pour expli­quer sa dis­pa­ri­tion, la plus pro­bable étant un pro­fit trop mince ayant déçu les action­naires, à qui on avait pro­mis de beaux béné­fices. Ce modèle d’affaires triom­pha­liste fut fré­quent à l’époque et le qua­li­fi­ca­tif « catho­lique » ne semble pas avoir suf­fi pour amoin­drir les dérives du capi­ta­lisme cinématographique.

Un socle invisible

Nous avons docu­men­té et décrit l’activité d’une com­pa­gnie de ciné­ma qué­bé­coise pra­ti­que­ment incon­nue jusqu’ici, Ciné­ma cana­dien. Créée pour répondre de façon com­mer­ciale aux impé­ra­tifs de « bon ciné­ma » pro­pa­gés par l’élite clé­ri­co-natio­na­liste du Qué­bec au tour­nant des années 1920, la com­pa­gnie fut for­mée de petits inves­tis­seurs proches du cler­gé catho­lique fran­co­phone et se fit sur­tout connaître par le jour­nal Le Devoir, où elle ache­ta beau­coup de publi­ci­tés et obtint une cou­ver­ture et une pro­mo­tion excep­tion­nelles. Elle se déve­lop­pa rapi­de­ment, réa­li­sa plu­sieurs films en quelques mois, réus­sit à les dis­tri­buer assez lar­ge­ment, mais décli­na et dis­pa­rut presque aus­si vite qu’elle avait émergé.

Cette recherche déçoit par­tiel­le­ment parce qu’elle n’a per­mis la décou­verte d’aucun des films pro­duits par la com­pa­gnie étu­diée, une décep­tion qui accom­pagne la plu­part des recherches sur les films muets pro­duits au Qué­bec. Ces films per­met­traient non seule­ment de dis­po­ser de pré­cieuses images de l’époque, mais aus­si de mieux connaître quelles étaient les connais­sances et capa­ci­tés tech­niques et esthé­tiques des cinéastes cana­diens-fran­çais. Les sujets de leurs films peuvent être pré­ci­sés de façon assez détaillée grâce aux des­crip­tions nom­breuses que nous offrent les jour­naux de l’époque, mais il est pra­ti­que­ment impos­sible d’esquisser les contours de leur culture de l’image, puisqu’il s’agit d’un aspect sou­vent tu par les jour­naux. L’un de ces films réap­pa­raî­tra peut-être un jour et per­met­tra éven­tuel­le­ment d’en savoir plus.

L’étude qui se ter­mine ici montre tout de même que l’attrait du ciné­ma fut assez fort pour vaincre les ana­thèmes conser­va­teurs ou inté­gristes et pous­ser les catho­liques qué­bé­cois à ini­tier à leur tour une pro­duc­tion natio­nale. Leur effort ini­tial fut de courte durée, mais il fut pro­lon­gé pen­dant 30 ans par les prêtres-cinéastes et par quelques pro­duc­teurs indé­pen­dants. Leurs films étaient presque tous docu­men­taires et sou­vent des­ti­nés à la pro­pa­ga­tion d’une culture conser­va­trice, mais ils sont le socle et le patri­moine d’une culture ciné­ma­to­gra­phique qui ne peut les renier, même si son rayon­ne­ment s’est consti­tué plus tard en rup­ture avec eux. Nous ne pou­vons en regar­der les plus anciens pro­duits, mais nous savons que les efforts furent assez nom­breux à cette époque, une époque long­temps igno­rée parce qu’occultée par les tenants d’une his­to­rio­gra­phie du ciné­ma qué­bé­cois qui débu­te­rait seule­ment vers 1958 avec Les raquet­teurs.

JOURNAUX ET PÉRIODIQUES CONSULTÉS : L’Action popu­laire, Le Cour­rier de Saint-Hya­cinthe, Le Devoir, La Gazette offi­cielle du Qué­bec, Motion Pic­ture News, Moving Pic­ture World, Le Natio­na­liste, La Presse, Le Pro­grès du Sague­nay, La Revue moderne, L’Union des Can­tons de l’Est. Le jour­nal Le Devoir est cité beau­coup plus que les autres à cause de son sou­tien à l’entreprise étu­diée ; un exa­men des micro­films des autres jour­naux n’a pas révé­lé de men­tions autres que celles de la recherche par mots-clés dans les archives numérisées.

Notice biographique

Ger­main Lacasse est pro­fes­seur retrai­té de l’Université de Mont­réal, où il a été pro­fes­seur-cher­cheur de 1995 à 2015. Spé­cia­liste du ciné­ma des pre­miers temps et du ciné­ma qué­bé­cois, il s’est d’abord consa­cré aux débuts du ciné­ma au Qué­bec, puis à une recherche trans­na­tio­nale sur les boni­men­teurs de films. Il s’est aus­si inté­res­sé aux rap­ports entre le ciné­ma et l’oralité, et pré­pare main­te­nant une his­toire de la lan­terne magique au Qué­bec. Outre de nom­breux articles dans des revues aca­dé­miques, ses prin­ci­pales publi­ca­tions sont His­toires de scopes. Le ciné­ma muet au Qué­bec (1989), Le boni­men­teur de vues ani­mées. Le ciné­ma muet entre tra­di­tion et moder­ni­té (2000) et Le diable en ville. Alex Sil­vio et l’émergence de la moder­ni­té popu­laire au Qué­bec (2012).


  1. C’était le point de vue d’historiens comme Yves Lever, Robert Dau­de­lin, Gilles Mar­so­lais etc. Voir Robert Dau­de­lin, Vingt ans de ciné­ma au Cana­da fran­çais (Qué­bec : Minis­tère des affaires cultu­relles, 1967) ; Yves Lever, His­toire géné­rale du ciné­ma au Qué­bec (Mont­réal : Boréal, 1988) ; Yves Lever, Anas­ta­sie ou la cen­sure du ciné­ma au Qué­bec (Mont­réal : Sep­ten­trion, 2008) ; Gilles Mar­so­lais, L’aventure du ciné­ma direct revi­si­tée (Laval : Les 400 coups, 1997).

  2. Ger­main Lacasse, His­toires de scopes. Le ciné­ma muet au Qué­bec (Mont­réal : Ciné­ma­thèque qué­bé­coise, 1988) ; Scott Mac­Ken­zie, Scree­ning Qué­bec: Qué­bé­cois Moving Images, Natio­nal Iden­ti­ty and the Public Sphere (Man­ches­ter : Man­ches­ter Uni­ver­si­ty Press, 2004) ; Louis Pel­le­tier, The Fel­lows Who Dress the Pic­tures: Mon­treal Film Exhi­bi­tors in the Days of Ver­ti­cal Inte­gra­tion (1912–1952), thèse de doc­to­rat (Mont­réal : Uni­ver­si­té Concor­dia, 2012).

  3. Dimi­tri Vezy­ro­glou, « Les catho­liques, le ciné­ma, et la conquête des masses : le tour­nant de la fin des années 1920 », Revue d’histoire moderne et contem­po­raine 51 (2004) :118.

  4. Robert Mol­hant, Les catho­liques et le ciné­ma. Une étrange his­toire de craintes et de pas­sions. Les débuts 1895–1935 (Bruxelles : Édi­tions de l’Office catho­lique inter­na­tio­nal du ciné­ma, 2000), 14.

  5. Ger­main Lacasse, L’Historiographe. Les débuts du spec­tacle ciné­ma­to­gra­phique au Qué­bec (Mont­réal : Ciné­ma­thèque qué­bé­coise, 1985).

  6. Lever, Anas­ta­sie ou la cen­sure du ciné­ma au Qué­bec, 17–47.

  7. Léon‑H. Bélan­ger, Les Oui­me­to­scopes : Léo-Ernest Oui­met et les débuts du ciné­ma qué­bé­cois (Mont­réal : VLB, 1978), 154–160.

  8. Fran­cis­co P. Cas­tro, « Catho­li­cism and Mexi­can Cine­ma: A Secu­lar State, a Dee­ply Conser­va­tive Socie­ty and a Power­ful Catho­lic Hie­rar­chy », dans Mora­li­zing Cine­ma: Film, Catho­li­cism and Power, sous la direc­tion de Daniel Bil­te­reyst et Danie­la Tre­ve­ri Gen­na­ri (New York : Rout­ledge, 2015), 70. Cer­taines de ces orga­ni­sa­tions sont aus­si men­tion­nées dans Ter­ry Lind­vall, Sanc­tua­ry Cine­ma: Ori­gins of the Chris­tian Film Indus­try (New York : New York Uni­ver­si­ty Press, 2007), même si ce livre traite sur­tout du ciné­ma pro­tes­tant.

  9. Gui­do Convents, « Resis­ting the Lure of the Modern World: Catho­lics, Inter­na­tio­nal Poli­tics, and the Esta­blish­ment of the Inter­na­tio­nal Catho­lic Office for Cine­ma (1918–1928) », dans Bil­te­reyst et al., 19–34.

  10. « Ano­ther Move Toward Clean­sing », Moving Pic­ture World (3 mars 1917) : 1356.

  11. « New Cor­po­ra­tions: Vir­gi­nia: The Catho­lic Art Asso­cia­tion Incor­po­ra­ted », Motion Pic­ture News 16.25 (novembre-décembre 1917) : 4324. Ne pas confondre avec une autre orga­ni­sa­tion por­tant le même nom et fon­dée en 1937 par Esther New­port.

  12. Mar­ga­ret Mac­Do­nald, « The Vic­tim. Joseph Leve­ring Pro­duces Inter­es­ting Roman Catho­lic Pro­pa­gan­da Sto­ry for Catho­lic Art Asso­cia­tion », Moving Pic­ture World (29 décembre 1917) : 1954.

  13. Ces consta­ta­tions sont tirées de recherches menées sur le por­tail Media His­to­ry Digi­tal Libra­ry (mediahistoryproject.org), qui donne un accès à presque tous les pério­diques cor­po­ra­tifs amé­ri­cains anciens.

  14. « Men and Events in the Film Cen­ters. Cana­da », Motion Pic­ture News (17 décembre 1921) : 3228. Voir aus­si : « Catho­lic Art Asso­cia­tion Now Ope­ra­ting in Cana­da », Moving Pic­ture World (17 décembre 1921) : 820.

  15. « Une pel­li­cule nou­veau genre », Le Devoir (11 octobre 1921) : 3.

  16. Mar­cel Levac, « Notre enne­mi le ciné­ma », Le Natio­na­liste (16 octobre 1921) : 1.

  17. « La cano­ni­sa­tion de Jeanne d’Arc », Le Devoir (2 juin 1922) : 3.

  18. Nemo, « Pré­sident de ciné­ma », Le Devoir (6 juin 1922) : 1.

  19. E.S., « Le film catho­lique », Le Devoir (26 sep­tembre 1922) : 1.

  20. Atten­tion de ne pas confondre avec « Le bon ciné­ma », une entre­prise de pro­jec­tion diri­gée par Jean-Bap­tiste Para­dis.

  21. « Le Bon ciné­ma, com­pa­gnie, limi­tée », Gazette offi­cielle du Qué­bec (décembre 1922) : 3150.

  22. Luc Aubry, « Le ciné­ma cana­dien », La Revue moderne (décembre 1922) : 15.

  23. « Salle du Col­lège. Made­leine de Ver­chères  », publi­ci­té dif­fu­sée dans L’Union des Can­tons de l’Est (25 février 1925).

  24. Ce film est dis­pa­ru mais son scé­na­rio a été repro­duit dans Nou­velles Vues 12 (prin­temps-été 2011).

  25. D. John Tur­ner men­tionne briè­ve­ment cette com­pa­gnie dans un article sur J.-A. Homier paru en 1980 dans La Presse. Il indique qu’elle tour­na un film en Aca­die et un autre mon­trant le défi­lé de la Saint-Jean-Bap­tiste en 1924, mais il ne four­nit aucun autre détail.

  26. Émile Benoist, « Com­merce et finance. Nos enquêtes éco­no­miques. Le Ciné­ma cana­dien limi­tée », Le Devoir (6 décembre 1924) : 10.

  27. « Notre nou­velle adresse, Le Ciné­ma cana­dien ltée », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (29 mai 1926) : 6.

  28. Benoist, « Com­merce et finance ».

  29. « M. S.-T. Gre­nier décé­dé à 65 ans », Le Devoir (4 novembre 1946) : 3.

  30. « M. S.-T. Gre­nier décé­dé à 65 ans » , 3.

  31. « Va et vient », Le Pro­grès du Sague­nay (2 mai 1907) : 6.

  32. « La nomi­na­tion des can­di­dats à Artha­bas­ka », L’Union des Can­tons de l’Est (1er février 1923) : 2.

  33. « Inau­gu­ra­tion offi­cielle du nou­veau club libé­ral », Le Cour­rier de Saint-Hya­cinthe (14 sep­tembre 1918) : 1.

  34. Raphaël Oui­met, Bio­gra­phies cana­diennes-fran­çaises (1937) (Mont­réal : S. e.) : 245.

  35. Benoist, « Com­merce et finance ».

  36. « Vues ani­mées », La Presse (20 décembre 1923) : 24.

  37. « Vues ani­mées », 24.

  38. « Vues ani­mées », 24.

  39. Benoist, « Com­merce et finance ».

  40. « Un film du Ciné­ma cana­dien », Le Devoir (20 février 1925) : 7.

  41. Benoist, « Com­merce et finance ».

  42. « La vie spor­tive. Une soi­rée bien réus­sie », Le Devoir (4 avril 1924). La Presse et La Patrie publièrent toutes deux un même compte ren­du de cet évé­ne­ment.

  43. « La vie spor­tive ».

  44. Benoist, « Com­merce et finance ».

  45. « Un appel à nos catho­liques et natio­naux », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (29 mars 1924) : 8.

  46. « Le Ciné­ma cana­dien n’est pas un bluff », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (2 avril 1924) : 6.

  47. « Le quatre-vingt-dixième anni­ver­saire de fon­da­tion de la Socié­té S.-Jean-Baptiste », La Presse (23 mai 1924) : 1.

  48. « La fête natio­nale. L’explication des chars allé­go­riques », Le Devoir (24 juin 1924) : 4.

  49. « Le défi­lé du 24 juin », Le Devoir (28 jan­vier 1925) : 3.

  50. « Le défi­lé du 24 juin », 3.

  51. « Achat d’un film his­to­rique par M. Har­kin, com­mis­saire des parcs natio­naux », La Presse (9 avril 1925) : 1.

  52. « Les fêtes du 24 juin », Le Devoir (23 mars 1925) : 8.

  53. Samuel Leduc-Fre­nette, Les pèle­ri­nages du Devoir en Aca­die (1924 et 1927) : un voyage inté­res­sé et curieux pour les Cana­diens fran­çais, mémoire de maî­trise (Mont­réal : Uni­ver­si­té Concor­dia, 2016), folios 41 et 53–54.

  54. « Grande mani­fes­ta­tion à la gare Bona­ven­ture, same­di soir », Le Devoir (25 août 1924) : 1.

  55. Benoist, « Com­merce et finance ».

  56. Une pre­mière liste de 35 pho­tos est annon­cée dans « Des pho­to­gra­phies du voyage en Aca­die », Le Devoir (5 sep­tembre 1924) : 4.

  57. « L’œuvre du Bon ciné­ma », Le Devoir (5 décembre 1924) : 1.

  58. « Une foule se presse », Le Devoir (11 décembre 1924) : 1.

  59. « Une foule se presse », 1.

  60. « Loca­tion des rou­leaux du Devoir en Aca­die », Le Devoir (11 décembre 1924) : 3.

  61. « Le Devoir en Aca­die », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (22 décembre 1924) : 1.

  62. « Le film du voyage du Devoir en Aca­die », Le Devoir (16 mai 1933 et 13 sep­tembre 1933).

  63. « Ciné­ma cana­dien limi­tée », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (17 jan­vier 1925) : 7.

  64. Site web de la Fon­da­tion Jérôme Sey­doux-Pathé : http://www.fondation-jeromeseydoux-pathe.com/ (der­nière consul­ta­tion le 12 jan­vier 2018).

  65. « Ciné­ma cana­dien limi­tée », publi­ci­té dif­fu­sée dans L’Action popu­laire (6 mai 1926).

  66. « Visions du pas­sé », La Presse (11 mai 1925) : 2.

  67. « Pro­me­nade his­to­rique », Le Devoir (25 juin 1925) : 2. La Presse contient aus­si un compte ren­du très détaillé de la parade, y com­pris une liste des 35 chars allé­go­riques (25 juin 1925 : 11).

  68. « Pour nos hôtes de l’Ouest », Le Devoir (18 décembre 1925).

  69. « Le Ciné­ma cana­dien limi­tée », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (25 février 1926) : 4.

  70. « Le Bon ciné­ma », Le Pro­grès du Sague­nay (8 juin 1926) : 3.

  71. « Ciné­ma cana­dien limi­tée », publi­ci­té dif­fu­sée dans Le Devoir (17 jan­vier 1925) : 7.